UNIVERSITÉ PARIS-PANTHÉON-ASSAS
L’asile est assurément indissociable de la frontière : celle-ci marque les contours du refuge, protège celui qui craint les persécutions de ses persécuteurs, empêchés de la franchir. Le rattachement au pays d’origine, dans le droit international et européen de l’asile, trace la ligne entre nationaux et étrangers, frontière des appartenances qui permet la protection internationale des seconds : on ne cherche pas asile au sein de son propre pays. Encore faut-il cependant à l’étranger qui cherche une protection pouvoir, précisément, franchir cette frontière.
La pratique des dernières années met en évidence la montée d’une logique de recherche de faute dans la gestion des franchissements massifs de frontières. En effet, l’accent se déplace des critères objectifs d’« afflux massif » vers l’évaluation d’un comportement fautif, soit imputé aux migrants lors du franchissement, soit attribué à des acteurs tiers au titre de « l’instrumentalisation ». Cette approche s’inscrit dans la dynamique préexistante d’externalisation en faisant peser sur les migrants ou sur des États tiers la responsabilité de la gestion des frontières. La recherche d’une faute ravive également l’exceptionnalisme de la frontière. Ainsi, elle mène à brouiller les différentes fonctions de la frontière, et de confondre les catégories de migrants, au risque d’éroder le principe de non-refoulement et l’examen individuel des situations. Dans ce contexte, la capacité de l’État à distinguer clairement les impératifs humanitaires, les réponses sécuritaires et les différends interétatiques, puis à mobiliser pour chacun des moyens adaptés, constitue une garantie de la cohérence du droit international et européen des migrations.
Depuis le Brexit, les traversées de la Manche en small boats ont connu une augmentation rapide et soutenue. Ce phénomène met en lumière la question du franchissement de la frontière franco-britannique pour les personnes exilées et soulève, en creux, celle des possibilités d’accès légal au Royaume-Uni. Alors qu’un nouvel accord bilatéral pour freiner ces traversées vient d’être adopté en juillet 2025, introduisant une voie légale d’accès au Royaume-Uni en contrepartie d’un mécanisme de réadmission, cet article retrace l’évolution, au cours de la dernière décennie, des voies légales accessibles aux personnes exilées à la frontière franco-britannique. S’appuyant sur une approche juridique et empirique, nourrie par l’expérience de terrain de l’association Safe Passage International, il analyse la manière dont ces dispositifs révèlent les tensions entre politiques de contrôle migratoire, impératifs humanitaires et obligations internationales de protection qui animent cet espace frontalier, et interroge la façon dont ils oscillent entre instruments de protection et outils politiques au service de la gestion des flux migratoires.
Les États-Unis ont transformé leurs frontières nord et sud en obstacles systématiques à l’exercice du droit d’asile. La Proclamation n°10888 du 20 janvier 2025 constitue l’aboutissement de cette politique restrictive : elle suspend formellement l’accès à la protection internationale à la frontière sud en qualifiant les flux migratoires d’« invasion ». Cette instrumentalisation transcende les clivages partisans et révèle une mutation durable du rapport américain au principe de non-refoulement. L’analyse comparative des politiques frontalières avec le Mexique et le Canada révèle l’émergence d’un système continental où les frontières deviennent des zones d’exception juridique. Au sud, l’évolution du mur frontalier, l’invocation du Title 42, puis l’instauration du système CBP One mettent en exergue une logique d’escalade qui trouve son aboutissement dans la suspension complète du droit d’asile. Au nord, l’extension de l’ « Entente sur les tiers pays sûrs » (ETPS) à l’ensemble de la frontière canadienne en 2023, maintenue sous pression économique américaine, démontre l’instrumentalisation de la coercition commerciale. L’étude révèle comment des pratiques comme le metering, la digitalisation de l’asile et la fragmentation des responsabilités étatiques ont créé un régime d’exclusion qui, sans le violer directement vidaient le droit international des réfugiés de sa substance, avant que la Proclamation n°10888 ne marque le parachèvement de cette stratégie d’escalade par une suspension formelle. Ce modèle nord-américain, par l’exploitation des asymétries économiques régionales et la coordination d’exclusions aux deux frontières, menace l’architecture universelle de protection établie depuis 1951.
Cet article s'interroge, premièrement, sur la manière dont les voies légales et sûres, en particulier la réinstallation et les couloirs humanitaires, sont réglementées dans la législation française et sur la manière dont elles sont mises ...
Une frontière normative divise le droit africain de l’asile. La Charte africaine de la démocratie (2007) trace une ligne infranchissable en interdisant l’asile aux auteurs des changements anticonstitutionnels. Face à elle, la Convention de ...
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Le lien familial entre l'enfant et ses parents, lorsque ces derniers sont eux-même demandeurs d'asile, complexifie le traitement procédural de la demande d'asile du mineur accompagné, devant l'OFPRA comme devant la CNDA. La contribution revient ...